Le président de l'UMP, Jean-François Copé, appelle les déçus de François Hollande à manifester leur mécontentement lors de la manifestation du 26 mai contre le mariage pour tous. Le maire de Meaux (Seine-et-Marne) appelle les manifestants à exprimer leur opposition "dans les urnes". Dressant un bilan sévère de la première année du chef de l'Etat à l'Elysée, il propose une "transformation profonde" du modèle français.
Allez-vous défiler une nouvelle fois contre le mariage pour tous le 26 mai ? N'est-ce pas la manifestation de trop, puisque le texte a été validé par le Conseil constitutionnel ?
Jean-François Copé : Je serai présent le 26 mai. Cette journée sera une occasion de défendre la famille et plus globalement de manifester notre opposition à la politique de François Hollande, qui porte des valeurs à l'opposé des nôtres. Après les manifestations, le rendez-vous suivant sera dans les urnes lors des municipales. Quand nous serons revenus au pouvoir, il faudra réécrire ce texte pour protéger la filiation et les droits de l'enfant. Peut-être avec le recours au référendum. J'invite les centaines de milliers de Français qui ont manifesté contre ce texte et les millions de Français qui s'y sont opposés dans leur coeur à transformer cet engagement sociétal en un engagement politique.
N'est-ce pas de la récupération ?
Non, c'est mon rôle de président du premier parti d'opposition d'inviter les Français à prolonger leur engagement pour oeuvrer au redressement du pays.
François Hollande a maintenu sa promesse d'inverser la courbe du chômage d'ici à la fin de l'année. Cet engagement est-il réalisable ?
La conférence de presse l'a illustré, François Hollande est décalé, déconnecté, coupé des réalités. Il fait une erreur d'analyse : il temporise en attendant une hypothétique reprise de la croissance. Mais il a tellement augmenté les impôts que les moteurs ne peuvent plus repartir. Si on veut vraiment inverser la courbe du chômage et revenir au plein-emploi, si l'on veut redevenir une puissance attractive, une autre politique est indispensable. Maintenant.
Que préconisez-vous ?
L'UMP, qui est un parti de gouvernement, doit s'opposer mais aussi proposer une transformation profonde d'un modèle aujourd'hui dépassé. L'Etat est devenu omniprésent dans la sphère économique : il multiplie les dépenses, les embauches, les normes. Du coup, il perd son efficacité là où les Français ont le plus besoin de lui : dans l'éducation et la formation, la sécurité et la justice, l'immigration, la laïcité. François Hollande n'a fait que renforcer ce déséquilibre. Quand il demande des efforts aux Français, il leur demande plus d'impôts, alors que le véritable effort, c'est de travailler plus, d'innover plus, de produire plus et mieux. Il est temps de remettre les choses à l'endroit.
Le chef de l'Etat a annoncé la présentation d'un texte au Parlement sur le droit de vote des étrangers après les municipales de 2014, qu'en pensez-vous ?
Sur le fond, j'y suis résolument opposé. Le droit de vote des étrangers, qui établit un lien entre nationalité et droit de vote, n'est pas dans notre tradition républicaine. Quant à la méthode, elle est méprisable : encore une manoeuvre politicienne à l'approche des municipales pour diviser les Français, faire monter le FN et instrumentaliser les étrangers qui vivent en France. Personne n'est dupe de cette méthode mitterrandienne.
Vous avez prédit un "printemps des cons" lors d'un meeting à Nîmes, le 6 mai. Qu'entendez-vous par cette formule ?
J'ai voulu dénoncer le véritable scandale que constitue l'affaire du "mur des cons". De quoi s'agit-il ? D'une "liste noire" réalisée par le syndicat de la magistrature, avec des photos d'hommes politiques de droite et surtout de parents qui avaient eu le malheur de demander des comptes parce que leurs filles avaient été tuées par des récidivistes. A travers eux, ce sont des millions de Français qui se sentent insultés. Quant à l'image des magistrats, elle est ternie, alors qu'une grande majorité d'entre eux fait parfaitement son travail.
J'ai voulu aussi critiquer le silence troublant du président de la République. Vaut-il complicité ? Je prédis que les Français lui diront leur mécontentement en rejoignant les listes de l'UMP lors des élections municipales du printemps 2014. Ce vote aura une dimension locale mais aussi nationale, car les Français pourront exprimer leur opposition à sa politique.
Votre discours est-il audible, alors que la droite était au pouvoir il y a encore un an ?
Les socialistes ne peuvent plus nous faire le coup de l'héritage. François Hollande a interrompu la totalité de nos réformes de structure et a augmenté les impôts de 32 milliards d'euros. Il a renoué avec le laxisme et la culture de l'excuse face à la délinquance. Le résultat est là. Il se résume cette semaine en deux événements inquiétants qui symbolisent les échecs de la première année : la récession dans le domaine économique ; les émeutes urbaines au Trocadéro dans le domaine régalien...
Vous avez trouvé un accord avec François Fillon pour réformer les statuts de l'UMP. La hache de guerre est-elle enterrée ?
Totalement. Si nous avions des griefs, ils sont clairement derrière nous. Le rôle du premier parti d'opposition est de se préoccuper uniquement de la reconquête du coeur des Français.
Comment avez-vous pu vous rallier au principe de la primaire, après avoir fortement critiqué celle organisée par le PS en 2011 ?
C'est une concession. Même si la primaire ne correspond pas à l'idée gaullienne que je me fais de nos institutions, j'ai considéré que rien n'était plus important que l'apaisement.
Vous répétez que vous seriez aux côtés de Nicolas Sarkozy s'il revenait. S'il est candidat à la primaire de 2016, vous ne seriez donc pas candidat contre lui ?
Je serais à ses côtés, la formulation suffit à elle-même. Pour le reste, c'est à Nicolas Sarkozy de décider s'il veut revenir ou non.
Diriez-vous, comme François Fillon, que vous vous présenterez à la primaire "quoi qu'il arrive" ?
Non. Mon horizon immédiat, ce sont les municipales. C'est mon seul objectif. Je répète à ceux qui ne pensent qu'à la présidentielle que nous ne gagnerons pas 2017 sans l'emporter avant en 2014.
Est-ce nécessaire d'organiser un nouveau vote pour la présidence de l'UMP, en septembre ?
Ce scrutin résulte d'un accord passé avec François Fillon, et j'ai pour habitude de respecter mes engagements. Nous avons prévu d'en parler avec lui et avec les militants. Je constate que beaucoup à l'UMP sont défavorables à ce nouveau vote. Je consulte les uns et les autres, et nous verrons quelle est la meilleure solution.
Cette élection pourrait-elle être annulée ou repoussée ?
Il n'y aura pas de report. Soit elle aura lieu en septembre, soit elle aura lieu au terme de mon mandat.
Arnaud Cléré, candidat UMP à Gamaches (Somme), qui a annoncé son intention de faire une alliance avec le FN, a été suspendu de votre parti. Va-t-il être exclu ?
Son exclusion a été prononcée par le bureau politique de l'UMP, le 14 mai. S'il revient sur sa décision, nous reviendrons sur la nôtre. Si ce n'est pas le cas, il aura un candidat UMP face à lui.
Et pour Roland Chassain, maire UMP des Saintes-Maries-de-la-Mer (Bouches-du-Rhône), qui s'était désisté en faveur du FN aux législatives ?
Nous avons décidé de lui envoyer une lettre d'avertissement.
Pourquoi ne sera-t-il pas exclu, comme le bureau politique l'avait demandé en juin 2012 ?
Car il n'a pas été jusqu'à nouer une alliance effective avec le FN.
Pensez-vous, comme François Fillon, que "le FN est à combattre car il est en dehors des limites du pacte républicain" ?
Je mets exactement à égalité le Front national et le Front de gauche. Pour moi, Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon mènent le même combat. C'est pour cela que, dans l'hypothèse d'un duel local entre le FN et le PS, je n'appellerai pas à voter pour le FN ni pour le PS, allié à M. Mélenchon.
Le Monde